
Les « tentes de l’amour » sont un phénomène nouveau dans plusieurs universités chinoises. Il s’agit de tentes mises en place gratuitement pour accueillir les parents accompagnant leurs enfants lorsqu’ils intègrent l’université.
Ces tentes leur permettent de s’assurer que leurs enfants disposent de tout ce dont ils ont besoin. Certains parlent d’une manifestation d’amour, d’autres y voient la meilleure preuve de la dépendance.
Le phénomène des « parents trop présents » ne se limite toutefois pas à la Chine. Les éducateurs et les employeurs du monde entier parlent aujourd’hui de parents qui sont « toujours là », faisant trop à la place de leurs enfants.
Il apparaît qu’un nombre croissant de parents a du mal à couper le cordon : les uns font les devoirs de leurs enfants ou contestent les notes qu’ils reçoivent, les autres téléphonent à leurs écoles ou colonies de vacances pour la moindre raison et d’autres encore les appellent « toute la journée » s’ils ont des téléphones portables.
Même sur le lieu de travail, la présence parentale pose problème avec les parents qui appellent les employeurs de leurs enfants adultes pour négocier à leur place les salaires ou même soumettre leurs conditions.
En 1996, les chercheurs David Bredehoft, Jean Illsley Clarke et Connie Dawson ont analysé l’impact de la surprotection parentale sur les enfants.
Après en avoir observé plus de 3 500 pendant plusieurs années, ils ont écrit le livre « Combien c’est trop ? Comment élever des enfants sympathiques, responsables et respectueux – des tout-petits aux adolescents – à l’ère de la surprotection » (livre en anglais). Leur étude a montré que de nombreux parents en « faisaient trop ».
Voici comment ils décrivent la surprotection :
« La surprotection des enfants, c’est leur donner trop de ce qui semble bien, trop tôt et trop longtemps. C’est leur donner des choses ou des expériences qui ne sont pas appropriées à leur âge ou à leurs intérêts et talents. C’est (…) donner des choses aux enfants pour répondre aux besoins de l’adulte, pas de l’enfant. »
Les « parents contrôlants » sont un phénomène de longue date, souvent désigné par une variété de termes ; celui de « parents hélicoptères » est l’un des plus courants.
Dans l’un de ses livres, Haim Ginott parle d’un adolescent qui a le sentiment qu’on « plane » en permanence au-dessus de lui, comme un hélicoptère.
C’est de cette remarque qu’est né le terme de « parent hélicoptère », en référence à des parents beaucoup trop impliqués dans la vie éducative et sociale de leurs enfants.
Que signifie être trop impliqué dans la vie de votre enfant ?
En faire trop pour votre enfant peut vous mener droit au désastre. On sait aujourd’hui qu’être trop présent ou trop indulgent peut l’empêcher d’atteindre son plein potentiel. Comme le notent Bredehoft, Clarke et Dawson, cela peut freiner le développement des compétences clés nécessaires pour la vie.
Chaque enfant a besoin de savoir qu’il est aimé d’un amour inconditionnel et un grand nombre de ses besoins doivent être satisfaits. Mais il y a une énorme différence entre protéger et surprotéger, entre une présence bienveillante et « trop de présence ».
Être trop impliqué dans la vie de votre enfant signifie faire pour lui ce qu’il doit faire seul. Cela veut dire :
- En faire trop et le laisser faire trop peu ;
- Constamment « planer » au-dessus de lui ;
- Le laisser régulièrement se tirer d’affaire au lieu de le responsabiliser ;
- Le protéger des « défis de la vie » ;
- S’assurer sans cesse qu’il « ne s’ennuie pas ».
La surprotection, c’est faire tout ce que vous pouvez pour « protéger » votre enfant et « lui faciliter la vie ». Mais cela n’est bénéfique pour personne. Voici quelques bonnes raisons de changer de stratégie.
Les parents qui interviennent trop : Comment la surprotection affecte les enfants
La pratique d’être « trop présent » est assez courante.
Il arrive à tout le monde de faire pour son enfant ce qu’il faut le laisser faire seul : nous les habillons, même s’ils sont parfaitement capables de s’habiller par eux-mêmes, pour éviter d’être en retard ; nous ne leur demandons pas de nettoyer leurs dégâts parce qu’ils feront un « mauvais travail » ; nous ne leur demandons pas de participer aux tâches ménagères pour « garder la paix ». Bref, nous faisons beaucoup de choses pour que nos enfants soient heureux et sans stress.
Des chercheurs de l’University College London ont suivi plus de 5 000 personnes nées en 1946. Ils ont trouvé que ceux dont les parents étaient surprotecteurs avaient plus de mal à réguler leurs émotions et à contrôler leur comportement à l’âge adulte.
Leurs résultats ont montré que les participants qui avaient le souvenir d’être trop dépendant de leurs parents dans leur enfance étaient moins heureux et moins épanouis à 30, 40 et même 60 ans.
S’il est vrai que l’étude peut avoir été biaisée car les participants devaient se souvenir de leur enfance des années plus tard (en plus d’être basée uniquement sur leurs souvenirs), d’autres chercheurs ont souligné les dangers de la surprotection parentale.
Certains chercheurs suggèrent que le fait d’avoir des parents hélicoptères à un impact négatif sur le développement des compétences de gestion/management et une seconde étude suggère que plus les parents sont impliqués dans la vie de leurs enfants, plus il y a de chances que ces derniers soient aux prises avec des problèmes psychologiques et une difficulté à prendre des décisions seuls.
Voici quelques-uns des effets négatifs de la surprotection observés par Bredehoft et ses collègues :
- L’impuissance apprise : Quand vous surprotégez votre enfant, vous lui montrez qu’il ne peut pas réussir seul et qu’il a toujours besoin de quelqu’un pour « enlever les obstacles de son passage ».
- Irresponsabilité : Lorsque vous ne tenez pas votre enfant responsable de ses actes ou que vous faites tout pour lui (les tâches ménagères, par exemple), il y a des chances qu’il adopte un comportement irresponsable.
- Un sentiment qu’on lui doit quelque chose : Plus vous surprotégez votre enfant, plus il croira qu’il a droit à tout. Cela peut également conduire à un besoin de gratification immédiate, à une attitude matérialiste et à un désir d’être toujours le centre d’attraction.
- Mauvaise maîtrise de soi : En faire trop pour votre enfant l’empêche de développer les compétences dont il a besoin pour faire seul. Les chercheurs ont également constaté que l’incapacité à s’autocontrôler menait à une incapacité à se fixer des limites, menant souvent à une vie d’excès.
- Mauvaise résolution de problèmes : Une mauvaise résolution des problèmes résulte du manque de compétences de votre enfant pour faire face aux situations de conflit. Cela peut entraîner des problèmes relationnels, tant dans sa vie personnelle que sa vie professionnelle.
Bien que les participants interrogés aient souvent évoqué « se sentir aimé », la plupart ont parlé de la confusion, de la gêne, de la culpabilité, du chagrin, de la honte et de la colère. Voici quelques-uns des commentaires obtenus lors de cette étude :
- « J’ai des difficultés extrêmes à prendre des décisions. »
- « J’ai besoin de louanges et de récompenses matérielles pour me sentir digne. »
- « Je n’ai pas besoin de grandir, car d’autres personnes prendront soin de moi. »
- « J’ai l’impression que j’ai besoin de beaucoup de choses pour me sentir bien dans ma peau. »
- « Je ne suis pas aimable. »
- « Je dois acheter des cadeaux pour être aimé. »
- « J’ai constamment besoin de la validation de mes amis. »
Alors, à quoi ressemble la surprotection parentale ?
3 signes qui montrent que vous en fait trop
Le parent hélicoptère implique un style parental basé sur l’excès. Le chercheur Jean Illsley Clarke parle de trois types de surprotection :
- En faire trop
La première forme de surprotection consiste à trop en faire pour votre enfant ou trop lui donner. Cela signifie trop de jouets, trop d’activités parascolaires, trop de livres, trop de jeux vidéo, trop de vêtements, etc.
2) « Trop d’amour »
Il est possible de « trop aimer » et cela implique « étouffez votre enfant avec amour », être toujours présent pour tout, lui donner trop d’attention. Cela peut aussi signifier l’appeler constamment pour savoir où il est, ce qu’il fait et avec qui.
Le professeur Richard Mullendore a qualifié les téléphones portables de « cordon ombilical le plus long du monde », en référence aux parents qui peuvent désormais surveiller constamment leurs enfants.
3) Cadre trop souple
La troisième forme fait référence au fait de faire pour vos enfants ce qu’ils devraient faire pour eux-mêmes. Cela pourrait signifier de ne pas les obliger à faire des tâches ménagères ou d’excuser leurs mauvais comportements.
Lorsque vous donnez trop à votre enfant ou que vous ne lui fournissez pas le cadre dont il a besoin pour développer des compétences clés, c’est un signe que vous le surprotégez. Pensez-vous être un parent qui en fait trop pour ses enfants ? Téléchargez le quiz ci-dessous pour le découvrir !
La surprotection parentale est toujours un signe d’amour. C’est toujours une tentative pour s’assurer que les besoins de votre enfant sont satisfaits. Le problème est qu’en faisant tout pour lui, vous l’empêchez de développer les compétences dont il aura besoin pour se débrouiller seul dans la vie.
Julie Lythcott-Haims, ancienne doyenne d’une université très connue, parle des dangers de « trop aider » les enfants.
Elle considère la surprotection parentale comme un piège et exhorte les parents à laisser leurs enfants expérimenter et apprendre de leurs erreurs. Elle dit que pour aider son enfant à devenir un adulte épanoui, il faut être prêt à lui dire : « Tu dois trouver ta propre réponse. »
Voici quelques conseils pour les parents hélicoptères.
Comment arrêter de trop s’impliquer dans la vie de votre enfant pour le préparer à une vie adulte épanouie
- Déterminez votre modèle de surprotection
En faites-vous trop pour vos enfants ou leur donnez-vous trop de choses ? Êtes-vous « trop aimant », toujours là, toujours en train de « planer » ? Avez-vous un cadre trop mou ? Excusez-vous constamment les comportements inappropriés ?
Le premier point de départ, si vous voulez élever un enfant plus responsable, est de déterminer où se trouve votre « plus grande faiblesse ».
Vous obtiendrez toujours de meilleurs résultats si vous commencez par de petits pas. Cela signifie qu’au lieu d’essayer de lutter contre toutes les formes de surprotection, commencez par la forme qui est la plus difficile pour vous : quelles sont les deux choses que vous arrêterez de faire à partir d’aujourd’hui ? Quelles sont les trois choses que vous allez commencer à faire dès aujourd’hui ? Une fois que vous avez cette première phase sous contrôle, vous pouvez passer à une deuxième forme de surprotection.
2) Lâchez prise !
De nombreux parents hélicoptères croient qu’en faisant à la place de leurs enfants, ils les aident ou peut être leur témoignent leur amour. C’est une fausse croyance. Si vous faites trop pour votre enfant, il est temps de le laisser se débrouiller seul. Cela pourrait ressembler à :
- Lui demander de participer aux tâches ménagères. Un moyen simple de commencer est de proposer plusieurs tâches et de lui demander d’en choisir au moins une à faire dans la semaine. Voici plus de 70 tâches adaptées aux enfants de 3 à 12 ans si vous manquez d’idées.
- Le rendre responsable de ses devoirs, même s’il faut appliquer une forme de discipline positive au départ.
- Le responsabiliser et lui permettre d’apprendre de ses erreurs. Vous pouvez commencer par lui apprendre à nettoyer ses dégâts. Même les plus jeunes peuvent le faire, par exemple en apportant un balai pour balayer ou en utilisant la pelle pour aider à nettoyer. N’oubliez pas que la responsabilisation n’a rien à voir avec la punition. Il s’agit simplement d’enseigner à votre enfant que tout le monde fait des erreurs, mais que chacun est responsable d’essayer de les réparer.
- Établir des règles fermes et raisonnables et des conséquences appropriées lorsque celles-ci sont enfreintes.
3) Apprenez à votre enfant qu’il est capable de réussir
Quand vous surprotégez votre enfant, vous lui envoyez le signal que vous n’avez aucune confiance dans sa capacité à se débrouiller tout seul. Cela lui apprend l’impuissance et le fait douter de sa capacité à réussir.
Si vous êtes un parent hélicoptère, il est temps de lui montrer que vous croyez qu’il peut réussir seul, que vous savez qu’il a ce qu’il faut pour apprendre de ses erreurs et atteindre ses objectifs. Si vous avez besoin d’aide, ce guide contient de nombreuses idées simples que vous pouvez commencer à utiliser dès aujourd’hui pour vous mettre sur le bon chemin.
Les références
Quand les parents hélicoptères planent sur le lieu de travail : Que doivent faire les responsables RH ?
« Aider ou planer ? Les effets de la surprotection sur le bien-être des étudiants »
Quel type de chef êtes-vous ? Cela dépend de vos parents
Mullendore : Le téléphone portable est un cordon ombilical pour les parents hélicoptères
Qu’est-ce que ça fait d’être surprotégé en enfance
Les perceptions des adultes de la surprotection parentale pendant l’enfance




Très intéressant comme sujet.
Il suffit de lire quelques lignes pour se rendre compte qu’on se retrouve parmi les personnes citées comme exemple.
Un grand merci pour ces articles. Personnellement, j’apprends beaucoup en les lisant.
Avec plaisir 🙂